vendredi 19 juillet 2013

La gestion durable de l'eau : cas pratique écologique

Remettre en cause la chasse d'eau, cela pourrait apparaître comme rétrograde voire suicidaire. Pourtant, Les Amis de la Terre en ont fait l'une des pierres angulaires de "La gestion durable de l'eau". De quoi faire réfléchir. 
 
« Tu peux sentir ». Jean montre fièrement son WC : un trône carré en bois. Pas de trace de chasse ou de réservoir d'eau. Par le trou, seul un mélange de tailles de haies hachées menu et quelques copeaux sont visibles. On a beau jeter un oeil sceptique sur la fosse, et inspirer par ses à priori, aucune odeur particulière ne monte au nez.
« On recouvre les besoins de litière, par couches successives », explique Jean Filatte, un des initiateurs de la réflexion sur l'eau aux Amis de la Terre. "Mélangés aux déchets alimentaires, le tout se transformera en un excellent compost en un an et demi environ, mais je te mets au défi déjà après quelques semaines de retrouver les déjections ».

Ecolo retrograde ?
N'empêche, même si le test olfactif est concluant, la toilette sèche apparaît toujours pour beaucoup comme une idée d'écolos extrémistes. On garde souvent en image la latrine au fond du jardin de l'époque de nos grand-parents, la porte en bois percée d'un cœur. Mais pour Jean Filatte, "c'est le retour à la chasse d'eau qui serait rétro. Quand on tire la chasse à Spa ça atterrit en 5 minutes dans la Vesdre à Pepinster, avec ce que cela engendre comme pollution. Ici je ne pollue pas et rien que par ma toilette j'économise un tiers de ma consommation d'eau tout en enrichissant les sols". 

Rien ne se perd, rien ne se gagne
P. Meulin, responsable de la campagne "La gestion durable de l'eau" aux Amis de la Terre, juge le système actuel d'évacuation aberrant : alors que, à l'état naturel, le cycle de l'eau et celui de la matière sont bien fermés (la matière organique, comme un excrément ou un arbre mort, se décompose et s'intègre au sol) nous les mélangeons au quotidien. En évacuant nos matières organiques dans l'eau, on casse l'équilibre du milieu aquatique et on prive le sol de nourriture. Le système d'épuration, lorsqu'il y en a un, tente de récupérer la sauce en transformant la matière organique contenue dans l'eau en matière minérale. En conséquence la teneur en nitrates augmente dans cette eau, laquelle ne reviendra pas à sa qualité initiale. Sans compter qu'un tel système représente une fameuse tirelire : la station d'épuration de Bruxelles sud a coûté 150 millions d'euros pour l'équivalent de 360 000 habitants.

Pas d'évangélisation
Bien entendu, le but des Amis de la Terre n'est pas de convertir tout le monde à l'utilisation de la toilette sèche, peu commode en ville, mais tout au moins de lancer une réflexion sur notre usage actuel de l'eau et la gestion des matières organiques. "Nous mettons de l'énergie à présenter la toilette à litière, mais pas exclusivement. Nous sommes en train de préparer un nouveau média qui sera consacré à l'eau de pluie, histoire de lutter contre une approche hygiéniste voulant une eau désinfectée des bactéries à 100% », nous raconte t-elle.