samedi 20 février 2016

Revalorisation touristique : les vertes collines du pays noir

Les régions minières d’Angleterre, de France, d’Allemagne ou de Belgique présentent invariablement des témoins imposants de leur passé : les terrils. Symboles d’une période révolue, liées dans l’imaginaire à la souffrance du mineur, ces collines urbaines sont aujourd’hui remises au goût du jour.


Début du siècle, la révolution industrielle a remué la terre wallonne, à la recherche de charbon. Des dizaines de milliers de taupes humaines ont creusé le sol pour sortir le combustible noir. Revenaient aussi au soleil des matériaux inutilisables. Ces débris s’amoncelèrent à l’ombre des charbonnages pour former les terrils.  Entre vestige et patrimoine, le terril renvoie aux mines, au ciel bas, aux catastrophes humaines, à la (sur)vie sous terre. Bref, la sinistrose en version maxi… Et pourtant, aujourd’hui, les anciennes zones industrielles entendent faire rimer terrils avec tourisme, balade, éco diversité, et développement durable !

En réinvestissant leurs collines urbaines, les villes font d’une pierre quatre coups : elles valorisent un patrimoine, développent une zone verte, assurent une valorisation touristique du local, et renforcent des dynamiques sociales. Ville emblématique du Pays Noir, Charleroi avance par étapes pour changer la vision des terrils: « ces dernières années ont surtout été consacrées à la préservation et la conservation des sites, explique la paysagiste Sylvie Poiret, responsable de projet au département de l'aménagement urbain. Nous étions dans un processus de défense et ensuite de promotion : faire valoir le terril en tant que plus-value paysagère et écologique. Ainsi, notre action inclut une pédagogie au niveau politique et citoyen pour revaloriser ce patrimoine. L’action englobe tous les terrils, mais ils n’ont pas tous la même dynamique. Nous en avons épinglé trois à Charleroi avec de fortes mobilisations citoyennes. Il y eut des phases de défense, de préservation, et d’aménagement. Maintenant, nous rentrons dans des projets éco-pédagogiques pour 2007. »


Maintenir ces géants courbés aurait pu susciter la désapprobation des locaux, minés par une histoire de plus en plus poussiéreuse. Mais « l’identité de Charleroi  est forcément sociale et  très attachée à ses terrils, affirme t-elle. Au niveau de la population, je connais très peu de résistances. » Tant et si bien que des quartiers se mobilisent pour classer « leur » terril, l’aménager, s’y promener. Et y découvrir la faune et flore. 

Quoi ? De la nature sur un gros tas de crasses ? « La dynamique végétale est identique aux collines. Et on retrouve certaines plantes qu’on ne trouvera pas ailleurs par le fait du substrat du relief, des pentes, de l’environnement. Le terril devient un milieu tout à fait original. Avec des plantes rares que l’on trouve plutôt dans une aire de répartition plus méditerranéenne. Leur présence s’explique par la captation de chaleur importante du terril. Ce sont des lieux très intéressants pour les botanistes, mais aussi pour les entomologistes. On retrouve des insectes qu’on ne retrouve pas ailleurs. »

Ajoutons à ces avantages un embellissement de la ville, qui se redécouvre au détour de bitume des cloches de verdure, et on comprend mieux pourquoi les régions industrielles, pour défendre les terrils, sont prêtes à aller au charbon...

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